Engagement de caution : les mentions manuscrites ne doivent pas englober la signature

Dans un arrêt en date du 26 juin 2019 (Cass. Com, 26 juin 2019, N° de Pourvoi 18-14.633) la chambre commerciale de la Cour de cassation a été amenée à se prononcer sur le formalisme de l’acte d’engagement de caution.

Au cas présent la disposition de la formule manuscrite relative à la caution était vraiment très particulière. Cette particularité donne un intérêt certain à cette décision de justice.

Je vous propose de prendre connaissance d’un commentaire de cet arrêt. Des données complémentaires sont également consultables.

1) Le commentaire de l’arrêt du 26 juin 2019 relatif à l’engagement de caution

Il résulte de l’actuel article L 331-1 du code de la consommation que toute personne physique qui s’engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel fait précéder sa signature de la mention manuscrite suivante et uniquement de celle-ci :  » en me portant caution de X……………….., dans la limite de la somme de……………….. couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de……………….., je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X……………….. n’y satisfait pas lui-même.  »

Cette règle était auparavant formulée par l’article L 341-2 du code de la consommation.

Il résulte de l’actuel article L 331-2 du code de la consommation que lorsque le créancier professionnel demande un cautionnement solidaire, la personne physique qui se porte caution fait précéder sa signature de la mention manuscrite suivante :  » en renonçant au bénéfice de discussion défini à l’article 2298 du code civil et en m’obligeant solidairement avec X je m’engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu’il poursuive préalablement X « .

Cette règle était auparavant formulée par l’article L 341-3 du code de la consommation.

Ces règles imposent un formalisme rigoureux. En particulier les mentions manuscrites prévues par ces articles doivent précéder la signature de la personne physique qui s’engage. A défaut l’engagement de caution est nul. La Cour de cassation s’était notamment prononcée en ce sens dans un arrêt en date du 01 avril 2014 par lequel elle avait affirmé qu’à peine de nullité l’engagement manuscrit de la caution doit précéder sa signature (Cass. Com. 01 avril 2014, N° de Pourvoi 13-15.735).

Dans l’arrêt récent en date du 26 juin 2019 présentement commenté la chambre commerciale de la cour de cassation a été amenée, de nouveau, à se prononcer sur le respect de ces règles.

Plus précisément la chambre commerciale de la cour de cassation a été contrainte d’indiquer si ces règles sont respectées lorsque les mentions manuscrites au lieu de précéder la signature entourent celle-ci. Cette organisation étonnante de la signature et des mentions manuscrites était présente sur un acte d’engagement de caution par lequel une personne s’était portée caution solidaire envers une banque dans le cadre d’un emprunt consenti par la banque à une société. Cette société a par la suite été mise en liquidation judiciaire et la banque avait assigné la personne physique en exécution de son engagement.

Dans cette affaire la Cour d’appel de Paris, par une décision en date du 22 décembre 2017, avait estimé que l’engagement de caution solidaire été nul. Pour parvenir à cette conclusion la Cour d’appel avait avoir relevé que la caution avait apposé sa signature en marge gauche des mentions manuscrites prescrites par les textes applicables, sous l’indication pré-imprimée de son nom, par une signature dont la taille la place au regard de six lignes seulement des quatorze lignes que ces mentions comportent. La Cour d’appel avait également constaté que le texte des mentions manuscrites avait une forme incurvée de sorte que la signature était contournée par les mentions manuscrites qui l’enveloppent. Ainsi au cas d’espèce la mention manuscrite ne précédait pas la signature.

La banque n’a aucunement accepté la décision de la cour d’appel. En conséquence la banque a exercé un pourvoi en cassation. Le pourvoi de la banque ne comportait qu’un seul moyen. Selon celui-ci l’irrégularité formelle de la mention manuscrite légale n’entraîne la nullité du cautionnement que si elle altère le sens et la portée de la mention manuscrite légale et il en va ainsi, en particulier, lorsque la signature de la caution n’est pas sous la manuscrite légale. Pour la banque en relevant, pour annuler l’acte de cautionnement de l’espèce, que la signature de la caution n’est pas placée sous la formule manuscrite légale mais se trouve entourée par elle et donc forme avec elle un tout indissociable, sans constater, ni établir par l’un quelconque de ses motifs, que cette circonstance affecterait le sens et la portée de la mention manuscrite légale qui est, hormis la place de la signature, entièrement régulière, la cour d’appel a violé les articles L. 341-2 ancien, L. 331-1 actuel, L. 341-3 ancien et L. 331-2 actuel du code de la consommation.

Ce raisonnement n’est pas celui qu’adopte la Cour de cassation. Au contraire la chambre commerciale de cette juridiction va dans le même sens que la Cour d’appel de Paris. Après avoir rappelé les constatations et appréciations faites par cette juridiction du second degré, et retracées par nous dans les commentaires ci-dessus, elle affirme qu’il résulte de celles-ci que la mention manuscrite ne précède pas la signature et qu’en conséquence la cour d’appel a exactement retenu que l’engagement de la caution était nul.

Cette décision ne peut qu’inciter les bénéficiaires d’un engagement de caution à observer la plus grande vigilance sur le formalisme applicable.

2) Données complémentaires

Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 juin 2019, N° de pourvoi: 18-14.633.

ECLI:FR:CCASS:2019:CO00546

Décision attaquée : Cour d’appel de Paris du 22 décembre 2017