📣 Élections EuropĂ©ennes 2024 : dĂ©finitions, motivations et techniques Ă©lectorales 💡

J’ai rĂ©cemment publiĂ© un short sur YouTube au sujet d’un article publiĂ© par PĂ©rine Schir, thĂ©sarde en philosophie politique, sur Slate. En rĂ©sumĂ©, son analyse consiste Ă  affirmer qu’un succĂšs du Rassemblement National aux Ă©lections europĂ©ennes serait une consĂ©quence de la prĂ©sence d’Éric Zemmour dans l’arĂšne politique et non une adhĂ©sion Ă  la politique souhaitĂ©e par le Rassemblement National.

Comme je l’ai expliquĂ© prĂ©cĂ©demment, ce raccourci trompeur est facile Ă  dĂ©monter. En effet, lors des Ă©lections europĂ©ennes de 2019, le Rassemblement National a remportĂ© les Ă©lections europĂ©ennes en France, alors qu’Éric Zemmour n’était pas dans l’arĂšne politique.

La rĂ©alitĂ© est donc plus complexe que celle dĂ©crite par PĂ©rine Schir, d’autant plus que celle-ci ne tient pas compte de plusieurs Ă©lĂ©ments importants.

Un Ă©lĂ©ment important dont il faut tenir compte Ă  mon sens rĂ©side dans le mode de scrutin. En effet, ces Ă©lections se dĂ©roulent avec un scrutin proportionnel de liste. Ce type de scrutin, contrairement Ă  un scrutin majoritaire, favorise une plus grande diversitĂ© concernant les partis politiques et offre une reprĂ©sentation plus Ă©quilibrĂ©e des diffĂ©rents courants politiques, alors qu’un scrutin majoritaire peut conduire Ă  une polarisation du paysage politique.

PrĂ©sentement, ce scrutin proportionnel de liste ne comporte qu’un tour. Cela est important car en France, entre les deux tours, souvent des partis politiques s’accordent pour annoncer la nĂ©cessitĂ© de faire un barrage au Rassemblement National, au nom des fumeuses valeurs rĂ©publicaines. C’est la thĂ©orie du fameux « vote utile » qui fausse la sincĂ©ritĂ© des Ă©lections en abusant de la crĂ©dulitĂ© des Ă©lecteurs. Ce risque Ă©tant moindre en prĂ©sence d’un seul tour, les Ă©lecteurs semblent plus Ă  mĂȘme de voter pour la liste qui est la plus conforme Ă  leur souhait vĂ©ritable.

Un autre Ă©lĂ©ment important dont il faut tenir compte m’est venu Ă  la lecture du livre « Etat de siĂšge » de MichaĂ«l Wolff. Dans ce livre, l’auteur cite Steve Bannon qui, Ă  l’approche des Ă©lections europĂ©ennes de 2019, avait remarquĂ© que les Ă©lections europĂ©ennes sont traditionnellement celles qui rencontrent le plus d’abstention. Il est exact qu’en France, les Ă©lections europĂ©ennes se distinguent par un fort taux d’abstention. Ainsi, on peut estimer que les personnes qui votent sont celles qui sont les plus motivĂ©es. DĂšs lors, contrairement Ă  la conclusion de PĂ©rine Schir, les Ă©lecteurs du Rassemblement National Ă  ces Ă©lections votent parce qu’ils sont rĂ©ellement motivĂ©s par les propositions de ce parti, Ă  dĂ©faut ils ne se rendraient pas aux urnes.

J’aurais aimĂ©, Ă  la lecture de l’article de cette personne, qu’elle nous donne sa dĂ©finition de l’extrĂȘme droite. Elle ne semble avoir que ce mot Ă  la bouche et inclure dans celui-ci Ă  peu prĂšs tout ce qui n’est pas Ă  gauche, laquelle semble correspondre Ă  sa propre idĂ©ologie politique, possiblement dans sa forme la plus extrĂȘme justement.

Ainsi, elle inclut dans ce terme le Rassemblement National, Éric Zemmour, ReconquĂȘte, voire Alain Finkielkraut, Michel Houellebecq et Michel Onfray, Ă  moins que pour ces trois derniers elle se contente de les classer dans ses chers producteurs idĂ©ologiques illibĂ©raux, sa phrasĂ©ologie manquant de clartĂ© sur ce point prĂ©cis.

En effet, le terme extrĂȘme droite est tellement galvaudĂ© aujourd’hui que l’on a tendance Ă  mettre dans cette classification tout ce qui ne fait pas allĂ©geance aux idĂ©es de la gauche. On aimerait donc avoir une dĂ©finition claire et prĂ©cise de ce terme par l’auteur de l’article qui se contente de citer un mot valise sans la moindre dĂ©monstration.

Des personnes qui travaillent sĂ©rieusement sur cette thĂ©matique font ainsi preuve d’une certaine prudence dans l’usage de ce terme. Ainsi, dans un dĂ©bat dont la version audio est consultable sur Radio France, le politologue Jean-Yves Camus estimait qu’aujourd’hui, l’extrĂȘme droite est reprĂ©sentĂ©e, par beaucoup d’observateurs, mais pas tous, par le Rassemblement National, et Ă©ventuellement par ReconquĂȘte !, le parti d’Éric Zemmour, ajoutant que ce n’est pas son avis, ce qui revient donc Ă  affirmer que selon lui, Éric Zemmour et ReconquĂȘte ne peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme appartenant Ă  l’extrĂȘme droite. Sur Cnews, il prĂ©cise son propos concernant le Rassemblement National, indiquant Ă©carter le terme extrĂȘme droite pour lui prĂ©fĂ©rer l’expression « droite radicale ».