Comment refuser un prélèvement d’organes ou de tissus

En France le don d’organe est imposé de manière autoritaire par l’État puisque la personne décédée est présumée avoir donné son consentement pour se faire prélever ses organes ainsi que ses tissus, ceci au nom d’une prétendue solidarité nationale (1).

Si le prélèvement d’organes peut permettre de sauver des vies (2) cette présomption et cette façon de considérer les défunts et de démembrer (3) le corps humain peut aussi sembler particulièrement abjecte et nauséabonde.

En effet la présomption légale vient combattre la réalité. Le défunt sur lequel les organes vont être prélevés n’a en réalité aucunement exprimé son souhait à ce prélèvement et le plus souvent il ne connaît aucunement la législation applicable en la matière. Il ne fait pas un don. Il peut même se croire, en raison de son ignorance de la loi applicable, protégé contre la mise en pièce de son corps.

Sa croyance peut être d’autant plus forte qu’il peut savoir qu’il existe une carte de donneur de don d’organes et de tissus disponible auprès de la Fédération des associations pour le don d’organes et de tissus humains. Le fait de porter cette carte montre indéniablement un accord pour le prélèvement. Le fait de ne pas avoir cette carte sur soi ne démontre en rien un accord pour le prélèvement mais correspond plus à une ignorance de la loi.

L’État français organise ainsi c’est que l’on appellerait tout simplement en d’autres circonstances et dans d’autres pays un vol d’organe. La loi qui a instauré cette présomption légale du consentement au prélèvement des organes et des tissus permet aux équipes médicales d’échapper à cette qualification.

Les personnes qui sont contre ce prélèvement imposé par la loi doivent s’y opposer et elles ont pour cela plusieurs possibilités.

La possibilité normalement la plus sure consiste à s’inscrire au registre national des refus des dons d’organes (4). Cette inscription peut être faite par Internet ou en envoyant un formulaire, voire même sur papier libre (5). Elle peut être faite à partir de l’âge de 13 ans.

L’inscription au registre national des refus des dons d’organes permet d’exprimer un refus de prélèvement qui peut porter sur l’ensemble des organes et des tissus susceptibles d’être prélevés ou seulement certains de ces organes ou tissus (6). Il nous a été donné de lire que si cette inscription est facultative elle devient obligatoire lorsque le refus du prélèvement porte sur la totalité des organes ou des tissus. Nous n’avons toutefois pas été en mesure de voir dans les textes applicables un distinguo allant en ce sens.

Avant de procéder à un prélèvement d’organes, les équipes médicales ont l’obligation de consulter le registre national des refus de dons d’organes. Si elles ne trouvent pas un refus dans le registre national elles ont alors l’obligation de procéder à un entretien avec les proches du défunt.

Avec cette entretien les membres de l’équipe médicale vont informer les proches du défunt qu’ils envisagent de procéder à un prélèvement d’organes et de tissus sur la personne décédée.

Lors de cet entretien l’équipe médicale va s’enquérir de l’existence d’un refus du défunt pour le prélèvement de tout ou partie de ses organes et de ses tissus.

En effet il existe d’autres moyens que l’inscription sur le registre national des refus pour s’opposer au prélèvement des organes et des tissus

Il est ainsi possible de mentionner par écrit le refus du prélèvement des organes et des tissus et de confier ce document à un proche (7). Encore faudra t’il bien choisir ce proche dans l’espoir que celui-ci soit contacté suite au décès. A défaut malgré l’opposition écrite du défaut de son vivant les organes et les tissus seront prélevés. Il y a donc là un inconvénient important.

Une autre possibilité pour exprimer son refus consiste à l’indiquer oralement à un membre de la famille. Apparaît alors la même problématique que le refus par écrit en dehors de l’inscription sur le registre national des refus. Pire encore l’équipe médicale en cas d’indication orale va vouloir des précisions, notamment sur les circonstances dans lesquelles le refus a été exprimé et la teneur exacte des déclarations faites (8). Nous osons espérer, sans aucune certitude, que cette obligation ne soit pas de nature à permettre à l’équipe médicale de ne pas s’estimer convaincue et de découper le corps de la personne décidée en allant à l’encontre de sa volonté la plus intime.

On voit donc bien que c’est l’inscription au registre national des refus de dons d’organes qu’il faut privilégier et accessoirement comme plusieurs précautions valent mieux qu’une il faut en parler à ses proches, de préférence en leur remettant un écrit, et en leur rappelant que l’inscription précitée a été faite. Ceci devra être exposé lors de l’entretien avec l’équipe médicale.

La personne décédée pouvant être une personne protégée il existe des règles particulières les concernant.

Ainsi pour un mineur il faut en principe recueillir par écrit l’accord des deux parents. Toutefois si l’un des parents ne peut pas être consulté l’équipe médicale peut se contenter de l’accord par écrit d’un seul parent, ce qui est particulièrement écœurant.

Pour un majeur sous tutelle, l’équipe médicale doit recueillir l’accord par écrit du tuteur.

La présomption d’accord au prélèvement des organes et des tissus est une règle de droit parfaitement abjecte qui devrait être mise à bas. Son abrogation est essentielle. Cet irrespect absolu du corps humains ne devrait pas exister. L’accord express et par écrit, de son vivant, du défunt devrait être obligatoire dans tous les cas et celui-ci pourrait être démontré par la possession de la carte de donneur d’organe. Chaque personne doit pouvoir faire de son corps ce qu’il en souhaite et nul ne devrait pouvoir contrevenir à cette volonté sans se voir appliquer les peines les plus sévères.

Notes de bas de page

(1) Cette illusoire solidarité nationale ne limite pourtant pas les receveurs aux seuls nationaux.

(2) Sauver une vie est un acte qui peut être considéré comme étant par essence un acte noble. Pourtant la personne qui recevra l’organe ou les tissus peut être un criminel, ou le devenir, qui ôtera des vies et qui consacrera la sienne au mal le plus vil.

(3) Le terme démembrer n’est ici pas utilisé dans son sens le plus strict (« mutiler en arrachant les membres ») mais dans un sens plus large (« mettre en pièces »).

(4) L’opposition peut être totale ou partielle. L’opposition peut porter sur une finalité thérapeutique, sur la recherche scientifique, sur l’autopsie médicale pour rechercher la cause du décès.

(5) Le formulaire ou le papier libre doivent être envoyé à l’Agence de la biomédecine avec une photocopie d’une pièce d’identité (carte nationale d’identité, passeport, titre de séjour…). L’envoi doit être accompagné d’une enveloppe timbrée avec le nom et l’adresse du déclarant pour recevoir la confirmation de l’enregistrement.

(6) Le refus de prélèvement des organes peut être révoqué à tout moment.

(7) Cet écrit doit être daté et signé par son auteur et comporter l’indication de ses nom, prénom, date et lieu de naissance. A défaut de signature et si l’acte n’est pas écrit par le défunt mais par une autre personne deux témoins doivent attester que ce document exprimé bien la volonté du défunt et ces attestations, avec noms et qualités des témoins, doivent être jointes à ce document.

(8) Obligation sera faite au déclarant d’attester par écrit la volonté du défunt.

Pour aller plus loin

– Pour obtenir la carte de donneur d’organes sur le site de la Fédération des Associations pour le don d’organes et de tissus humains.

– Accès au registre national des refus de dons d’organes.

– Accès aux articles L1211-1 à L1211-9 du Code de la santé publique.

– Accès aux articles R1232-4-4 à R1232-4-7 du Code de la santé publique.

– Accès aux articles R1232-5 à R1232-14 du Code de la santé publique.

– Accès aux articles L1232-1 à L1232-6 du Code de la santé publique.